Comme nous allons le voir plus loin il ne s’agit pas vraiment de culture avec généralement des résultats certains mais plutôt d’une tentative difficile d’obtenir avec un peu de chance des truffes dans les 10 à 20 ans qui suivent la plantation.
Notre domaine est situé dans la première région française productrice de truffes noire du Périgord (tuber mélanosporum) dans le sud de la Drome provençale.
Nous sommes entourés de truffières plus ou moins anciennes dont certaines produisent mais dont la majorité ne servent plus qu’à enjoliver le paysage de vieux chênes.
Tout naturellement nous avons donc décidé en hiver 2013 de consacrer une partie du domaine à cette « culture ».
Les Conditions
Nous avons tout d’abord vérifié que la parcelle sélectionnée d’environ 7000 m2 présentait toutes les caractéristiques requises à cette culture.
Il faut tout d’abord que le terrain soit calcaire et léger. Un pH entre 7,5 et 8,5 est idéal, le sol doit être bien drainant avec du sable et des pierres calcaires et ne doit pas avoir été défriché récemment.
En effet sur les racines des arbres qui auraient été enlevés peuvent pousser d’autres champignons qui plus tard peuvent entrer en concurrence avec la truffe.
Le climat qui convient pour cette variété de truffe (tuber mélanosporum) est évidemment celui de notre région c’est a dire un climat assez contrasté avec des hivers relativement froids, des étés très chauds et secs et de la pluie au printemps et en automne. Dans d’autres régions la culture d’autres variétés de truffes est possible mais elles présentent moins d’intérêts.
La truffe pousse sur les racines d’arbres « Hôtes » et il a fallu choisir un support. Les arbres les plus utilisés sont les chênes verts (qui ne perd pas ses feuilles en hiver), le chêne blanc et le noisetier. Ce dernier a la réputation de donner des truffes plus rapidement mais il a, paraît-il, le désavantage de produire moins longtemps.
Avec le réchauffement climatique et l’augmentation des températures en été nous avons choisi de planter uniquement des chênes verts qui semblent mieux résister aux grosses chaleurs alors qu’il y a une vingtaine d’années les agriculteurs plantaient généralement un mélange de chênes verts et blancs.
Sur les conseils des vendeurs de plants et en observant ce qui se faisait autour de chez nous nous avons planté 200 chênes tous les 2,5m en rangs espacés de 8m. Il faut en effet pour que l’arbre produise qu’il ne soit pas à l’ombre d’ou les 8m entre les rangs.
Quels arbres et chez qui les acheter?
C’est la que cela se corse, chacun dans la région sait quel est le meilleur producteur et surtout sait quel est le producteur dont les arbres ne produisent jamais. Comme toute la production est vendue « sous le manteau » et à 90% en espèces il est évidemment impossible de savoir qui dit vrai.
Plusieurs méthodes qui prétendent garantir une production certaine existent. Depuis plusieurs années la plupart des plants sont mycorhizé soit selon une méthode contrôlée par l’INRA soit selon la méthode du producteur de plants.
Certains paysans se contentent de récolter les glands de chênes qui produisent de la truffe et de les utiliser sans les mycorhizer. D’autres encore râpent un peu de truffe autour des chênes et l’enfouissent en grattant la terre autour de l’arbre. Bref chacun a sa méthode mais quelque soit la méthode tous les plants ne produisent pas, loin de la !
En ce qui me concerne je pense qu’il est quand même préférable d’acheter des plants mycorhizés soit par le producteur soit selon la méthode INRA. Les plants de 2 ans coutent entre 5 et 15 euro pièce selon la méthode et le nombre de plants achetés, ceux certifies par l’INRA étant évidemment les plus chers.
Pour ma part je pense que l’idéal est d’acheter les plants de plusieurs producteurs et de les mélanger, mais je pense que c’est le terrain qui contient ou non des spores de truffes qui est primordial, ce qui explique que des truffes poussent ou non sur un terrain quel que soit l’origine des chênes.
Il faut ensuite réussir à faire grandir les chênes sur un terrain sablonneux ce qui n’est pas évident. En effet le plant acheté est très petit (un plant de deux ans mesure généralement 15/20 cm) et a beaucoup de mal à reprendre s’il n’est pas régulièrement arrosé. La première année nous n’avons pas assez arrosé et perdu 1/3 de la plantation. Nous avons replanté en automne et le deuxième été nous avons arrosé toutes les semaines s’il ne pleuvait pas.
Cette fois nous n’avons perdu que quelques plants. Un arrosage régulier est donc indispensable et le plus simple et efficace est d’installer un goute à goute.
Autant des chênes poussent spontanément là ou ils ne devraient pas autant ceux en godets ont du mal à reprendre.
Quel avenir pour nos chênes ?
Nos chênes ont à présent 1 à 2 ans et se sont pour la plupart enracinés. Nous allons encore arroser abondamment 2/3 ans jusqu’à ce que les racines soient assez développées pour pomper l’eau en profondeur en été et il ne nous reste plus qu’à patienter encore 10 ans au minimum pour espérer récolter quelques truffes que nous récupérons actuellement chez notre voisin pour nos weekend truffes.